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Une journée en mer avec Anthony Guenec, ligneur à la Turballe

18 mars – 03h30 du matin. A peine quelques heures de sommeil et nous voilà en route pour La Turballe après une escale à La Baule depuis Paris. A bord de l'Onamission, patron et matelot s'affairent déjà, tous feux en marche. L'accueil est souriant. Benjamin le matelot, anonyme derrière sa cagoule, semble loin du marin parfois rêche qui n'a pas envie d'être dérangé par les « parisiens ».

Les petites seiches et maquereaux, récupérés auprès des chalutiers, sont découpés en tronçons de quelques centimètres afin d'aller garnir les hameçons. Cent par palangre, six palangres seront posées ce matin.

L'enthousiasme est modéré ce matin, alors que le bateau quitte le port, les six cent hameçons garnis d'appâts. La pêche de ces derniers jours n'a pas été bonne, entre mauvais temps et mauvaise pêche. Les lieus jaunes et merlans, déjà expédiés sur Paris il y a quelques semaines, ne sont pas vraiment au rendez vous. Les quelques kilos capturés malgré des explorations plus loin et plus au large, jusqu'à Belle-île, ne sont pas bien payés, à peine 5 euros le kilo. En effet, les débarquements massifs des fileyeurs et chalutiers hauturiers entraînent une saturation du marché. Ainsi, les produits des ligneurs, malgré une qualité supérieure, voient leur prix fortement baisser.

Poiscaille rémunère deux fois les prix que touche Anthony Guenec à la criée, en vous inscrivant aux casiers vous soutenez cette pêche objectivement durable

Aller loin consomme plus de carburant, impose de travailler dans des conditions plus difficiles et plus longtemps. Si le poisson n'est pas bien valorisé, l'équilibre économique n'est pas là. « Autant le laisser dans l'eau que de le débarquer pour quelques euros » lâche Anthony entre deux poses.

L'équipage a donc pris une option proche du port ce matin, à proximité des roches qui abritent une belle population de congres. Première roche, « le spot de la mort » lâche benjamin en souriant. Très près du port, il est choisi par de nombreux plaisanciers pour cibler les crevettes, tourteaux et homards. Poser une palangre dans ce coin c'est risquer de la mélanger avec les bouts des autres engins et donc perdre du matériel et du temps. Le bateau passe entre les fanions, détectés au dernier moment dans les faibles lumières de la nuit. Ca passe à chaque fois, sans les prendre dans l'hélice. Anthony reste humble et parle de « coup de bol », c'est surtout bien maîtrisé malgré une apparente naïveté.

07h, les six lignes ont été mises à l'eau, une petite heure de pause suffit pour laisser mordre les congres. Ce matin c'est blanquette de veau ou hachis parmentier, « la grande cuisine au micro-ondes » ! C'est l'occasion d'évoquer les dernières découvertes gastronomiques parisiennes d'Anthony qui a proposé d'expédier a quelques belles tables ses lieus jaunes et merlans avec Poiscaille.

Une petite voile est hissée à l'arrière, elle sert à stabiliser le bateau face au vent lors du « virage », c'est à dire la remontée des lignes. Les premiers congres montent assez rapidement à bord. Hissés au bout de la ligne pour les petits, à l'aide d'une gaffe pour les gros. Un dégorgeoir permet de décrocher les poissons piqués sur le bord de la mâchoire. Pour ceux qui ont engamé, Benjamin coupe le fil afin de gagner du temps.

Le virage se poursuit avec peu de casse même si Anthony concède que le congre « se travaille en force, dans la roche ». Une des palangres se retrouve bloquée, rien a faire, sinon tracter à l'aide du bateau et faire attention à ne pas se faire accrocher quand la ligne est brutalement emportée sans se décrocher. Elle finit par casser, emmêlée dans les rochers. Il n'y a plus qu'à reprendre l'autre bout et finir de virer.

Il est 11h, toutes les lignes sont relevées, route vers le port à petite vitesse. Le parc qui réceptionne les poissons contient environ 400 kilos de congres, de 3 à 10kg pièce, qu'il faut maintenant vider. Je file un coup de main à Benjamin pendant qu'Anthony pèse chaque poisson et les range dans les caisses. Les premiers poissons sont compliqués, aucune accroche sur ce poisson visqueux qui file entre les gants. Il faut faire attention à ne pas laisser traîner ses doigts, certains ont encore quelques réflexes et peuvent mordre sacrément fort (expérience vécue). Et puis le rythme rentre et on commence à voir le fond du parc, signe qu'il ne reste que quelques poissons à traiter.

Les goélands suivent, attendant les abats. L'opération est terminée, nous sommes déjà dans le port, on frôle le record de la sortie la plus courte avec cette pêche à proximité du port. Il n'y a plus qu'à décharger la pêche, placer les bacs dans la chambre froide et faire le tour des palangres pour remettre les hameçons perdus.

Les mareyeurs sont prévenus pour vendre la pêche. 1,5 € le kilo de moyenne ce jour là, il sera le dernier de la semaine au vu du temps des prochains jours et des faibles prix que l'équipage peut attendre. Les congres seront expédiés en Espagne où la demande pour cette espèce est nettement supérieure. Anthony et Benjamin cibleront encore quelques jours les congres avant de réarmer le navire avec les lignes à lieus jaunes et merlans. On a hâte de vous les faire goûter !

Pour retrouver les bars, lieus jaunes et autres captures d'Anthony, inscrivez-vous à nos casiers de la mer !

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