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La revue littéraire de Poiscaille

Contre temps et marées de Boris Charcossey, un carnet de bord crépusculaire sur un chalutier du grand large

L'auteur

Boris Charcossey est chercheur ethnologue. Il embarque dans le monde de la pêche au large par l'intermédiaire d'un projet de recherche sur le siki, une espèce de requin vivant entre 200 et 4000m de fond, à l'origine depuis plus de 30 ans de la polémique autour de l'exploitation des espèces des grands fonds. Durant 5 ans, il dévie progressivement de l'étude du requin vers celle de l'équipage. Il réembarque à plusieurs reprises sur le même bateau, un chalutier de plus de 45m qui pêche au large de l'Écosse.

Ce qu'il raconte

Une succession d'embarquements aux côtés des marins et la vie à bord du bateau durant 20 à 30 jours d'affilée pendant lesquels l'équipage évolue coupé du reste du monde. On y comprend les risques du métier, l'intensité du travail, l'épuisement des corps, les marqueurs hiérarchiques, la pression, la solitude, l'éloignement des proches... C'est un témoignage boulversant des souffrances endurées par un équipage de pêche industrielle.

Ce qu'on a adoré

Le style sans chi-chi et l'analyse sous tous les angles du fonctionnement de l'équipage, notamment les relations sociales qu'ils développent à bord. On s'attache à eux à mesure qu'on maudit le cadre de la pêche au large. On a apprécié les superbes photos d'archive issues des séjours en mer qui se succèdent tout au long du bouquin ainsi que les légendes allégoriques qui les accompagnent. Chez Poiscaille, on est quelques uns à avoir embarqué sur des chalutiers hauturiers similaires. L'analyse de Boris est très fidèle aux souvenirs que l'on a gardé de ces expériences. Ils ne sont pas toujours très agréables mais marquants. De quoi nous convaincre tous les jours, s'il est permis d'en douter, qu'il faut s'engager en faveur de la petite pêche.

Pour aller plus loin

Forcément quand on lit le livre, on pense aux enjeux écologiques majeurs du chalutage des grands fonds, un engin de plusieurs tonnes qui détruit l'habitat d'espèces mal connues des scientifiques. Des zones aujourd'hui poissonneuses mais pour combien de temps ? C'est une cause dont s'est emparée l'association Bloom devant la commission européenne entre 2012 et 2013, pour finalement obtenir l'interdiction du chalutage au delà des 800m de fond. Au delà de la profondeur de chalutage, on pense aussi aux rejets en mer qui peuvent représenter jusqu'à 40% de la capture en poids. Dans le livre, il est question d'un énorme requin pélerin asphyxié, que l'équipage peine à remettre à l'eau en un seul morceau. Du poisson mort, non conservé en cales parce que les quotas l'imposent ou qu'il faut optimiser la valeur marchande de ce qui va être débarqué puis vendu... Une petite histoire de la pêche moderne.

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